Développement industriel en Afrique : la malédiction des ressources

Article : Développement industriel en Afrique : la malédiction des ressources
Crédit: Iwaria
4 décembre 2022

Développement industriel en Afrique : la malédiction des ressources

Avec une population qui culmine autour de 3 milliards d’habitants, la terre du plus long fleuve (le Nil) et du plus grand désert du monde (le Sahara) regroupe 80% des réserves mondiales de coltan (majoritairement au Congo), 60% des terres non cultivées et 30% des réserves en pétrole, en gaz et en minéraux.

Riche des ressources naturelles, le continent qui aura la plus jeune population de la planète d’ici à 2050, continue, hélas, de servir de champ de bataille pour des rivalités économiques. Souffrant le martyr des géants de l’industrie, « les Damnés de terre » vivent dans la sempiternelle nuit de la pauvreté, du chômage et de la famine.

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Des mines du Congo…


Devant l’insuffisance des infrastructures et l’inefficacité du système éducatif, les regards épousent le macabre bilan de ceux qui se sont, ou dirions-nous, se sont fait, succéder à la tête des États. Mais à l’ère où l’information et le savoir s’acquièrent au bout des doigts, c’est un secret de Polichinelle de penser que le malheur de l’Afrique revient aux seuls africains.

L’on a beau rêver les yeux ouverts, le terrorisme qui se cache derrière les barreaux politiques et religieux dans les zones riches en ressources rares (or, diamant etc.) donne à réfléchir. Des mines de cobalt du Congo au désert de la Somalie, en passant par le grand Sahara, les virus irrémédiables des conflits dits communautaires naissent, se reproduisent et s’éternisent au fil des décennies.

Tirant leurs marrons du feu, les puissances économiques travers leur technologie assaillent le « continent noir ». Pendant qu’ils transforment notre coton en tissu pour venir nous le revendre, le cerveau du scientifique, le talent de l’artiste et les muscles du sportif continuent d’alimenter leurs négoces.
Déshérités de ses valeurs, le « nouveau africain » ne peut que braver la mort en traversant des océans, forêts et dunes de sables. Histoire de relier « l’enfer » natal et le « paradis » inconnu pour gagner sa vie.


Le Mali était bien parti


Pourtant, il y a moins de 70 ans, les Pères des indépendances avaient éclos un nouveau monde pour les « Nations Nègres ». Tout en préservant la langue et dans une certaine mesure le système politique, donc la culture occidentale, comme facteur de fédération des populations issues de diverses groupes ethno-linguistiques, les premiers dirgents avaient accordé une attention particulière à l’industrialisation.
Dans les années 1960, le Mali était bien parti pour une véritable souveraineté économique avec la création de la Société des Ciments du Mali (SOCIMA), la Société malienne du Bétail, des Peaux et Cuir (SOMBEPEC), la Société nationale de Recherche et d’Exploitation minières (SONAREM) et plus d’une dizaine d’autres entreprises étatiques. Mais passées les années de Modibo Keita, la plupart de celles-ci tombent en faillite.
Mauvaise gestion ou absence de base solide ? Quoi qu’il en soit, devant l’effondrement des patrimoines industriels, l’on se demande à quand notre Afrique sera le futur de l’Humanité ? En fait, à qui profite cet avenir qui ne tarde plus à venir, s’il n’est d’ailleurs pas déjà là ?

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Si les économistes d’aujourd’hui ne se lassent pas de nous rappeller la belle prophétie dans les amphis des Facultés, René Dumont soulignait quelques décennies plus tôt le manque d’initiatives innovantes pour amorcer un véritable développement industriel.

« Dans la nécessaire réduction générale des privilèges, détaille-t-il dans son célèbre essai intitulé l’Afrique est mal partie, il faudrait revaloriser les techniciens et les enseignants par rapport aux membres de l’administration et supprimer les suppléments de traitements des villes, et, notamment, des capitales, qui ont déjà bien assez d’attraits, pour, au contraire, créer des primes de brousse. »

Comme le cri du cœur de l’écrivain en faveur du monde rural peine à passer dans les pratiques, les rues des villes et bidonvilles refusent des bras valides venus de la lointaine brousse sans la moindre qualification professionnelle ou parfois détenteurs des diplômes qui ne riment pas avec les besoins du marché du travail.
En quête de leur pitance, les plus chanceux des victimes de la malédiction des ressources jonglent entre petits métiers (apprentis chauffeurs, gardiens, vendeurs ambulants etc.) pendant que les désespérés trouvent leur échappatoire dans la délinquance et le terrorisme.

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