Discrimination : Toute femme est femme, même celle en situation de handicap

Article : Discrimination : Toute femme est femme, même celle en situation de handicap
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9 juin 2021

Discrimination : Toute femme est femme, même celle en situation de handicap

Vivre dans une situation de handicap est difficile. Mais être une femme et vivre dans une situation de handicap est encore pire ! Au Mali, à cause des préjugés sociaux, nombreuses sont ces femmes, privées d’emploi et de mariage, qui n’ont d’autres moyens de survie que la mendicité. Mais d’où viennent ces tares, ces préjugés, et que faire pour les remédier ?

Devant les lieux de cultes et de loisirs, dans les rues et les marchés, devant les concessions et les établissements publics et privés (banques, écoles, centres de santé), sous le soleil et le froid insupportables, elle est ici, elle est là-bas, partout à la fois. Tout en chantant la « grandeur infinie » de Dieu, la « vieillotte » agite la paume, fermée sur les piécettes interposées de 25 et 50 F CFA pour attirer les regards passifs : « Fissabili lahi ! A y a di Ala ma ! (Pour la Grâce d’Allah, accordez l’aumône à la nécessiteuse !) », entonne-t-elle.

Causes

Si certaines d’entre elles arrivent à franchir les émailles du filet, en menant une vie normale, il faut dire que beaucoup d’autres n’ont droit à leurs pitances qu’en improvisant des litanies aux feux tricolores. Nombreuses sont ces femmes qui sont à la marge de la société, privées de formation, d’emploi et de mariage, voire même divorcées après une première grossesse. La cause ? Leur incapacité à effectuer certaines tâches physiques, un environnement défavorable pour étudier ou exercer un métier et surtout, des mythes socioculturels entretenus autour de leur apparence physique.

Préjugés

« Une femme sourde n’est pas intelligente, parce qu’elle ne communique pas de façon traditionnelle’, ‘avoir des rapports sexuels avec une femme handicapée intellectuelle rend riche’, entre autres, constituent des préjugés défavorables entretenus à l’encontre des femmes en situation de handicap », illustre Madame Rokiatou Diakité, présidente de l’Association pour le Renforcement des Capacités des Personnes Handicapées (ARCAPH) et spécialiste des questions du genre. « On observe également, poursuit notre interlocutrice, des restrictions de rôles ou de positions, fondées sur la superstition, selon lesquelles la femme en situation de handicap ne peut pas fonder ou prendre en charge une famille, voire même gérer un patrimoine. Les femmes victimes de ces discriminations représentent une large majorité. Et les plus pauvres n’ont pas accès aux services sociaux de base. Un nombre important d’entre elles, n’ayant reçu ni éducation, ni soutien nécessaire,  qui leur permettrait de mener une vie décente, restent confinées dans leurs maisons, s’adonnent à la mendicité ou parfois même à la prostitution. »

« 90 % des femmes en situation de handicap ne sont pas scolarisées »

Parmi les conséquences de leur discrimination figure l’analphabétisme, qui constitue un véritable obstacle. « A cause des caricatures sociales sur leur capacité et surtout du manque d’un environnement propice pour suivre les cours, plus de 90 % des femmes en situation de handicap ne sont pas scolarisées au Mali. Et il est indéniable que seules quelques unes parmi celles qui sont allées à l’école, qui représentent une infime pourcentage, ont accès aux postes électifs et nominatifs. A ce titre, on ne compte que 2 ou 3 conseillères municipales sur toute l’étendue du territoire national », s’indigne Mme Diakité.

Inclusion

Face à ces défis, il revient aux autorités politiques de prendre des initiatives innovatrices. Il s’agit, entre autres, d’emboîter le pas à d’autres nations modernes, en accordant des primes spéciales aux couples dont la femme est en situation de handicap, fixer un quota pour celles diplômées lors du concours d’entrée dans la Fonction publique, mieux, occuper des postes nominatifs (ministres, directrices..), redynamiser la formation professionnelle et bien entendu, l’entrepreneuriat des femmes en situation de handicap, avec des entreprises qui leur permettront de s’offrir une certaine autonomie et se rendre éventuellement plus utiles à la société.

Partant de là, nous parviendrons à éclore les potentialités qui sommeillent en ces femmes. Et en convenir, enfin, que libérées du joug des apparences physiques et des superstitions occultes, toute femme est femme, la femme en situation de handicap aussi. 

Khaled Mohamed

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